LE PRINTEMPS DES POETES 2009 : EN RIRE
Je ne ris plus
Hier, j’ai ri
Avant-hier, j’ai ri
Et tous les jours d’avant, autant qu’il m’en souvienne, aussi.
A chaque fois que j’ai pu, j’ai ri de tout
J’ai ri de moi surtout
Finalement, chaque jour passé fut un très grand esclaffement
Et je m’en suis trouvé fort bien portant.
Mais aujourd’hui je ne ris plus, je fais grise mine
Et je me mine
Même pire encore je crois déprime.
Car « Le Printemps des Poètes » lancé aux rimailleurs par la mairie
Impose le rire pour thème. Et j’en suis fort marri !
Car ça ne me plait en aucune sorte, et du coup
Par contrecoup, je ne ris plus du tout.
Car j’insupporte- j’ai en horreur- d’être embrigadé
Même pour du beurre, pour rire, pour versifier, d’être obligé.
Car sur le fond je suis rebelle, j’aime vivre et être en liberté
Je suis un anarchiste et m’insupportent toutes choses imposées
Pour dire : des soirs, je sors de mon placard le drapeau noir
Et ceins pour le plaisir mon front du bandeau noir
Et quelques fois ainsi drapé file sur Paris
La grande ville où tout y est permis.
Et puis le rire ne se commande pas
En simplement claquant les doigts ; ce ne sont pas
Des phrases, de simples mots
Alignés l’un après l’autre au fil de l’eau.
Ceux qui pensent ainsi ne sont que des petits rigolos.
Si encore sur le sujet j’avais quelques idées
Je me forcerais, à contre cœur bien sûr, de suivre la voie tracée
Je me ferais violence ! Mais de mon inspiration le puis est totalement tari
Sa source aussi, sèche comme d’autres le sont l’été en plein midi.
Depuis, stressé, je serre les dents, les poings, les fesses, tout
J’en ai perdu le sommeil, et l’appétit itou
Depuis que mes zygomatiques
N’exercent plus leur bienfaisante gymnastique.
En outre-horreur- sur tout mon corps poussent des eczémas
Non, plus rien ne va !
Pire, il m’est venu au nez un gros bouton
Enorme, protéiforme, comme un bubon
Que fuient les jeunes filles en fleur et les femmes plus mûres !
Dur !
Mon rire ne s’exhale plus de mes poumons
Je ne pleure plus à chaudes larmes, ni ne tressaute mon ventre rond.
Que faire pour retrouver ma joie de vivre
Pour, à nouveau, enfin rire ?
Car il faut que mes maux cessent et en finir.
J’ai bien pensé porter une plainte contre le maire et la mairie
Pour mise en danger de la santé d’autrui.
Ce ne serait que justice ! Certes ils ne trouveraient pas la chose à rire
Et les délais seraient fort longs pour aboutir.
Je serais sans doute malade et alité, peut-être même mourant
Avant !
Non, il faut que j’essaie autre chose, moins hostile
Et surtout plus rapide et facile.
Bon, tant pis, c’est décidé, je vais forcer ma vraie nature,
Comme demandé, je vais faire des travaux d’écriture
Tout au moins essayer- sur le rire
Pour guérir.