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Poètes du temps passé


Sur cette page, vous trouverez une sélection de poèmes.

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01 Poèmes saturniens

Par Verlaine Paul

A Eugène Carrière

 

« Les Sages d’autrefois, qui valaient bien ceux-ci,

Crurent, et c’est un point encor mal éclairci,

Lire au ciel les bonheurs ainsi que les désastres,

Et que chaque âme était liée à l’un des astres.

(On a beaucoup raillé, sans penser que souvent

Le rire est ridicule autant que décevant,

Cette explication du mystère nocturne)

Or ceux-là qui sont nés sous le signe SATURNE,

Fauve planète, chère aux nécromanciens,

Ont entre tous, d’après les grimoires anciens,

Bonne part de malheur et bonne part de bile.

L’Imagination, inquiète et débile,

Vient rendre nul en eux l’effort de la Raison.

Dans leurs veines le sang, subtil comme un poison,

Brûlant comme une lave, et rare, coule et roule

En grésillant leur triste Idéal qui s’écroule.

Tels les Saturniens doivent souffrir et tels

Mourir, en admettant que nous soyons mortels,

Leur plan de vie étant dessiné ligne à ligne

Par la logique d’une Influence maligne.»

 

Résignation (extraits)

 

Tout enfant, j’allais rêvant Ko-Hinnor,

Somptuosité persane et papale

Héliogabale et Sardanapale !

 

Mon désir créait sous des toits en or,

Parmi les parfums, au son des musiques,

Des harems sans fins, paradis physiques !

 

Aujourd’hui, plus calme et non moins ardent,

Mais sachant la vie et qu’il faut qu’on plie,

J’ai dû refréner ma belle folie,

Sans me résigner par trop cependant… »

 

Nevermore (extraits)

 

« …Nous étions seul et seule et marchions en rêvant,

Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.

Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :

« Quel fut ton plus beau jour ? » fit sa voix d’or vivant,

 

Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.

Un sourire discret lui donna la réplique,

Et je baisai sa main blanche, dévotement.

 

Ah ! les premières fleurs, qu’elles sont parfumées !

Et qu’il bruit avec un murmure charmant

Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées !

 

Après trois ans

 

Ayant poussé la porte qui chancelle,

Je me suis promené dans le petit jardin

Qu’éclairait doucement le soleil du matin,

Pailletant chaque fleur d’une humide étincelle.

 

Rien n’a changé. J’ai tout revu : l’humble tonnelle

De vigne folle avec les chaises de rotin…

Le jet d’eau fait toujours son murmure argentin

Et le vieux tremble sa plainte sempiternelle.

 

Les roses comme avant palpitent ; comme avant,

Les grands lys orgueilleux se balancent au vent,

Chaque alouette qui va et vient m’est connue.

 

Même j’ai retrouvé debout la Velléda,

Dont le plâtre s’écaille au bout de l’avenue,

Grêle, parmi l’odeur fade du réséda.