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Poètes du temps passé


Sur cette page, vous trouverez une sélection de poèmes.

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053 Les feuilles d'automne

Par Hugo Victor

31 (extraits)

 
Laissez. Tous ces enfants sont bien là. Qui vous dit
Que la bulle d’azur que mon souffle agrandit
A leur souffle indiscret s’écroule ?
Qui vous dit que leur voix, leurs pas, leurs jeux, leurs cris,
Effarouchent la muse et chassent les péris ?
Venez, enfants, venez en foule !
 
Venez autour de moi ! riez, chantez, courez !
Votre œil me jettera quelques rayons dorés,
Votre voix charmera mes heures.
C’est la seule, en ce monde où rien ne nous sourit,
Qui vienne du dehors sans troubler dans l’esprit
Le chœur des voix intérieures.
 
Fâcheux, qui les vouliez écarter ! Croyez-vous
Que notre cœur n’est pas plus serein et plus doux
Au sortir de leurs jeunes rondes ?
Croyez-vous que j’ai peur quand je vois au milieu
De mes rêves rougis ou de sang ou de feu
Passer toutes ces têtes blondes ?
 
La vie est-elle donc si charmante à vos yeux,
Qu’il faille préférer à tout ce bruit joyeux
Une maison vide et muette ?
N’ôtez pas, la pitié même vous le défend,
Un rayon de soleil, un sourire d’enfant
Au ciel sombre, au cœur du poète !.....
 
…..Oh ! que j’aime mieux ma joie et mon plaisir,
Et toute ma famille avec tout mon loisir,
Dût la gloire ingrate et frivole,
Dussent mes vers, troublés de ces ris familiers,
S’enfuir, comme devant un essaim d’écoliers
Une troupe d’oiseaux s’envolent !....
 
…..Venez, enfants ! A vous jardins, cours, escaliers !
Ebranlez et planchers, et plafonds, et piliers !
Que le jour s’achève ou renaisse,
Courez et bourdonnez comme l’abeille aux champs !
Ma joie et mon bonheur et mon âme et mes chants
Iront où vous irez, jeunesse !.....
 
…..Moi, quelque soit le monde, et l’homme, et l’avenir,
Soit qu’il faille oublier ou se ressouvenir,
Que Dieu m’afflige ou me console,
Je ne veux habiter la cité des vivants
Que dans une maison qu’une rumeur d’enfants
Fasse toujours vivante et folle.
 
De même, si jamais enfin je vous revois,
Beau pays dont la langue est faite pour ma voix,
Dont mes yeux aimaient les campagnes,
Bords où mes pas enfants suivaient Napoléon,
Fortes villes du Cid ! ô Valence, ô Léon,
Castille, Aragon, mes Espagnes !
 
Je ne veux traverser vos plaines, vos cités,
Franchir vos ponts d’une arche entre deux monts jetés,
Voir vos palais romains ou maures,
Votre Guadalquivir qui serpente et s’enfuit,
Que dans ces chars dorés qu’emplissent de leur bruit
Les grelots des mules sonores.
 
32
 
Quand le livre où s’endort chaque soir ma pensée,
Quand l’air de la maison, les soucis du foyer,
Quand le bourdonnement de la ville insensée
Où toujours on entend quelque chose crier,
 
Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
Le regard de mon âme à la terre tourné ;
 
Elle s’échappe enfin, va, marche, et dans la plaine
Prend le même sentier qu’elle prendra demain,
Qui l’égare au hasard et toujours la ramène,
Comme un coursier prudent qui connaît le chemin.
 
Elle court aux forêts, où dans l’ombre indécise
Flottent tant de rayons, de murmures, de voix,
Trouve la rêverie au premier arbre assise,
Et toutes deux s’en vont ensemble dans les bois.
 
34 (extraits)
 
….Quand l’enfant vient, la joie arrive et nous éclaire.
On rit, on se récrie, on l’appelle, et sa mère
Tremble à le voir marcher…
 
…L’enfant paraît, adieu le ciel et la patrie
Et les poètes saints ! la grave causerie
S’arrête en souriant…..
 
….Seigneur ! préservez-moi,  préservez ceux que j’aime,
Frères, parents, amis, et mes ennemis même
Dans le mal triomphants,
De jamais voir, Seigneur, l’été sans fleurs vermeilles,
La cage sans oiseaux, la ruche sans abeilles,
La maison sans enfants !
 
36
 
Parfois, lorsque tout dort, je m’assieds plein de joie
Sous le dôme étoilé qui sur nos fronts flamboie ;
J’écoute si d’en haut il tombe quelque bruit ;
Et l’heure vainement me frappe de son aile
Quand je contemple, ému, cette fête éternelle
Que le ciel rayonnant donne au monde la nuit.
 
Souvent alors j’ai cru que ces soleils de flamme
Dans ce monde endormi n’échauffaient que mon âme ;
Qu’à les comprendre seul j’étais prédestiné ;
Que j’étais, moi, vaine ombre obscure et taciturne,
Le roi mystérieux de la pompe nocturne ;
Que le ciel pour moi seul s’était illuminé !
 
 
 
 
 
 

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