La mémé
Elle avait besoin d’une présence et de parler
De dire deux mots, la mémé
Pour rompre sa solitude et crier sa détresse
A demeurer au long des heures et des jours seule
Toujours seule, oh, si seule.
Surtout en cette fin d’année
En ces moments de liesse
Qui rassemblent enfants et familles, amants, amis
Dans la joie et auxquels elle ne serait pas conviée
La laissant à l’écart
Encore une fois, seule ; j’ai senti
Son âme fissurée
Saisie par les grands froids et les glaces, et son regard
Déjà plongé dans les tréfonds noirs
Des abysses sans fin et sans retour
Où il n’y a plus d’amour
Ni d’espoir.
Pourtant je devinais qu’encore elle était forte, la mémé
Qu’elle n’abandonnait pas et calfeutrait le bateau
De sa vie qui de toutes parts prenait l’eau.
Mais combien de jours, de mois, d’années
Tiendrait-elle ainsi, combien de temps avant de couler ?
Je lui ai souri
J’ai écouté ses premiers mots
Et ceux nombreux qui ont suivi
Je les lui ai rendus, ses mots
Et même bien d’autres aussi.
Elle était gentille, la mémé
Du réconfort, de l’amitié je lui en ai donnés
Autant que j’ai pu, mais pas assez, ce fut pour elle trop court
Quelques minutes, alors qu’elle criait mais sans le dire « au secours »
Et demandait « toujours ».
De faire davantage, je n’ai pas su et n’en ai pas été capable.
Depuis
Sourdement
Douloureusement
Pensant à elle chaque fois quelque chose tiraille en moi et crie
« Coupable ! »